L’Algérie continue à utiliser le traitement à base d’hydroxychloroquine contre la Covid-19, au moment où cet antipaludéen perd en popularité à l’étranger et où son principal promoteur, le professeur Didier Raoult, directeur de l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée infection à Marseille, est poursuivi, en France, pour, entre autres, “charlatanisme”. Selon des professionnels algériens du secteur de la santé, l’hydroxychloroquine est toujours en usage dans nos hôpitaux, même si au niveau de certains services, on lui préfère désormais d’autres traitements. Une situation qui suscite des interrogations, il faut le dire.
Un responsable du ministère de la Santé qui a préféré garder l’anonymat nous a expliqué que “l’Algérie continue officiellement à utiliser ce traitement thérapeutique administré aux personnes atteintes de la Covid-19” sans expliquer la position officielle du ministère de la Santé par rapport à la controverse qui entoure ce traitement.
Afin d’en savoir plus, nous avons pris attache avec le service communication du ministère de la Santé. “La réponse devrait se trouver chez les membres de la commission scientifique chargée de suivre l’évolution de la pandémie dans le pays”, nous a expliqué une responsable de la cellule de communication. Nous avons tenté de contacter à plusieurs reprises la commission en question, sans succès.
« La chloroquine a été efficace »
“L’hydroxychloroquine a démontré son efficacité. Il y a beaucoup de médecins qui l’ont utilisée et qui disent avoir eu de très bons résultats aussi bien en France que chez nous. Nous avons commencé à administrer le traitement qui était le seul disponible au début de la pandémie. Apparemment il a donné des résultats sur le terrain, puisqu’on a constaté une accalmie”, affirme le Dr. Yacine Terkmane, membre de l’ordre de médecins de la wilaya de Blida.
Selon lui, des médecins algériens ont opté pour d’autres traitements, au fur et à mesure, notamment pour les cas jugés « graves ». L’abandon progressif de l’utilisation de l’hydroxychloroquine est-il dû à l’inefficacité de ce traitement thérapeutique ? À cette question, le Dr. Terkmane dira qu’en l’absence d’une étude sur terrain, “il est difficile de faire un bilan ou une évaluation”. “On peut dire, par expérience, que la majorité des patients ayant suivi le traitement à base de l’hydroxychloroquine ont donné des signes positifs, notamment au début de la pandémie”, a-t-il soutenu.
Il ajoute la non utilisation de l’hydroxychloroquine dans le traitement des patients atteints au covid-19, “n’a rien à voir avec ce qui se passe dans d’autres pays”. “C’est en fonction de l’évolution de la situation et de nos expériences acquises sur le terrain que nous avons commencé à connaître plus au moins le virus. Il faut dire que les choses ont évolué depuis l’apparition du virus. Maintenant, je sais que l’utilisation de l’hydroxychloroquine a été abandonnée dans plusieurs services, notamment dans le traitement des cas graves”, explique-t-il.
D’après notre interlocuteur, “la généralisation de l’utilisation de ce traitement, au début de la pandémie, s’explique par le manque de connaissance de ce virus qui était nouveau pour nous tous, mais avec le temps, on a commencé à adopter d’autres traitements en optant pour la corticothérapie et les anticoagulants et d’autres médicaments pour la réanimation. L’hydroxychloroquine est encore administrée uniquement aux personnes atteintes du virus et qui ne présentent pas de symptômes graves”, a-t-il affirmé.
En Algérie, aucune bilan officiel n’a été rendu public par les autorités sanitaires en ce qui concerne l’adoption de la chloroquine depuis le début de la pandémie.
Pour rappel, les autorités sanitaires en France ont autorisé l’administration de cette molécule contre la Covid-19 “uniquement pour les formes sévères, hospitalisées ou en réanimation “, durant le mois de mars dernier avant d’interdire carrément son utilisation quelques semaines après. Les autorités sanitaires françaises avaient expliqué cette décision en indiquant que “les études, du professeur Raoult, n’avaient pas été menées, selon les protocoles scientifiques standards”.
Pour sa part, l’Organisation mondiale de la santé avait décidé, au mois de juin dernier, l’arrêt des essais cliniques sur l’hydroxychloroquine en tant que traitement potentiel des malades du Covid-19 hospitalisés, arrivant à la conclusion que cet antipaludéen ne réduisait pas leur taux de mortalité. “L’hydroxychloroquine n’a pas d’effet bénéfique en matière de Covid-19”, avait annoncé l’Organisation mondiale de la santé.
“Un complot médiatico-politique”
Dans une interview publiée mardi sur la chaîne Youtube de l’institut qu’il dirige, le professeur Didier Raoult a affirmé qu’il était victime d’un complot “politico-médiatique”. Il reproche à ses détracteurs de ne pas avoir eu une “approche scientifique” en émettant leurs réserves quant à l’efficacité du traitement qu’il préconise.
Abdellah Bourim