La revue El Djeich a dans son dernier numéro dévoilé les coulisses d’une enquête menée par ses propres journalistes aux frontières terrestres avec le Maroc.
L’équipe de journalistes s’est déplacée vers la bande frontalière ouest du pays, accompagnant les éléments des garde-frontières sur le terrain du secteur militaire de Naâma pour s’arrêter sur les détails se rapportant à la question, les voies par lesquelles transitent les importantes quantités ainsi que les efforts fournis par les unités de l’Armée nationale populaire de lutte contre la contrebande et la criminalité organisée.
L’enquête sur le terrain a réussi à remonter les filières où passe la drogue ainsi que les itinéraires qu’empruntent les barons marocains pour passer des quantités énormes sur le sol algérien. Après avoir été aux premières loges lors de la saisie de 73 kg de kif, chargés sur le dos de deux bêtes de somme au lieu-dit Djebel Ras Ould Maâmar, distant d’environ 3 km du poste avancé de Chambra, relevant de l’escadron autonome des garde-frontières et de 1 km de la bande frontalière du pays voisin, ils ont donné la parole au commandant de l’escadron des garde-frontières de Hadjrat Mguil pour expliquer les méthodes employées par les barons marocains aidés par le Makhzen pour pénétrer en territoire algérien mais aussi pour éviter la surveillance des garde-frontières.
«Le trafic de ce poison à partir du territoire du pays voisin et dans cet environnement au relief difficile, ne se fait pas à bord de véhicules de type 4X4 mais plutôt à l’aide des caravanes constituées de bêtes de somme, au niveau des pistes et des sentiers étroits et pénibles. Ce qui est frappant dans ce type de trafic, est que les contrebandiers amènent une mule de réserve au cas où l’une des bêtes est dans l’incapacité de marcher, en raison d’une entorse ou d’une blessure.
Les dos de ces bêtes de somme qu’il nous a été donné de saisir portent les stigmates du poids de la charge et du long et difficile trajet parcouru, un véritable crime à l’encontre de ces animaux». Pour cet officier, certains contrebandiers ont l’habitude de faire transiter leur poison à dos de mules et d’ânes sans accompagnateur. « Ces caravanes empruntent des pistes qu’elles ont l’habitude de traverser seules pour arriver à destination.
Si ces dernières sont débusquézs, le trafiquant sera à l’abri du danger» dit-il. Le commandant de l’escadron autonome des garde-frontières de Benyakhou ajoute : «Le trafic des stupéfiants dans cette partie de la bande frontalière est très actif la nuit.
Les trafiquants exploitent l’obscurité pour éviter les garde-frontières, même s’ils doivent parcourir plusieurs kilomètres dans le désert, les montagnes et traverser les cours d’eau, sans guide, voire sans éclairage de peur d’être découverts par les patrouilles de sécurité». Outre l’utilisation de ces bêtes de somme, les trafiquants exploitent les systèmes de communication modernes et font appel à des éclaireurs chargés de repérer la route, connus dans le langage du crime frontalier sous le nom d’«El Haday».
Ils sont dotés par les narcotrafiquants de systèmes de communication modernes et de systèmes optiques nocturnes et diurnes. Positionnés sur les hauteurs, ils surveillent les mouvements et les patrouilles des garde-frontières et présentent toutes les informations sur la piste ou la présence de barrages ou de patrouilles des protecteurs du pays, voire s’il y a un quelconque risque sur l’itinéraire prévu.
A ce propos, des garde-frontières nous ont raconté avoir intercepté à plusieurs reprises des «Hadaya», qui restent sur place pendant plusieurs jours sans s’ennuyer, guettant toute erreur de notre part pour faire transiter les chargements de leur poison.
De plus, plusieurs antennes ont été installées de l’autre côté des frontières par les autorités marocaines. Celles-ci ont été installées par les opérateurs mobiles de ce pays. Ces antennes n’ont aucune utilité économique, surtout en absence de groupements d’habitations près des frontières.
Ce qui confirme qu’elles sont installées dans le but de faciliter la communication entre les réseaux criminels et la mafia de la drogue qui utilisent les territoires du pays voisin comme abri sûr. Les affaires déjà traitées confortent d’ailleurs cette hypothèse. L’inspection de téléphones portables saisis auprès de certains contrebandiers a effectivement révélé des puces d’opérateurs mobiles du pays voisin.
Mahmoud Tadjer