Le Président de la République Abdelmadjid Tebboune a reçu hier l’ambassadeur d’Algérie en France, Mohamed Antar Daoud, qui regagnera, dès aujourd’hui, son poste à Paris pour poursuivre sa mission, selon un tweet de la Présidence de la République. Apaisement après la visite du chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian le 8 décembre dernier et incident clos puisque le Président Macron a exprimé «des regrets» au sujet de ses propos déplacés qui ont causé le rappel de l’ambassadeur algérien depuis début l’automne.
C’est du côté français que la crise diplomatique a été provoquée, c’était donc à Paris de se rattraper, de corriger sa copie. La France s’y est résignée face à la détermination du Président Abdelmadjid Tebboune de ne pas laisser passer l’affront. Après de nombreux signaux lancés à travers des messages indirects, le président Emmanuel Macron a chargé l’un de ses conseillers de faire par des «regrets» du président français quant aux propos désobligeants qu’il avait tenus au sujet de l’Algérie, de son histoire et de ses affaires internes.
L’absence de Tebboune
C’était en marge de la Conférence internationale sur la Libye le 5 novembre dernier. Un conseiller du Président français a déclaré : «Le président de la République regrette les polémiques et les malentendus engendrés par les propos rapportés (…) Le président Emmanuel Macron a le plus grand respect pour la nation algérienne, pour son histoire et pour la souveraineté de l’Algérie. » Il faut préciser que lors de ce rendez-vous parisien consacré au règlement de la crise libyenne, la diplomatie française a regretté l’absence du Président de la République algérienne, Abdelmadjid Tebboune. En effet, c’est le Ministre des Affaires Etrangères et de la Communauté établie à l’étranger, Ramtane Lamamra qui a représenté l’Algérie lors de cette rencontre tandis qu’Abdelmadjid Tebboune s’est déplacé personnellement en Allemagne pour la Conférence de Berlin concernant aussi la Libye. Or, la présidence française avait insisté : «Le président Emmanuel Macron souhaite que la relation bilatérale se développe au bénéfice des populations algérienne et française, mais également pour répondre aux grands défis régionaux, à commencer par la Libye (…) le président algérien Abdelmadjid Tebboune est invité à la conférence de vendredi pour aider la Libye à redevenir un pays stable. » Mais, comme l’a déclaré le président algérien dans un entretien accordé au journal allemand Der Spiegel, Tebboune a refusé de «faire le premier pas pour tenter d’apaiser les tensions avec son homologue français qui, avec ses propos, a rouvert un vieux conflit de manière totalement inutile. » Le chef de l’Etat algérien rajoutant «Pourquoi a-t-il dit ça? Je pense que c’était pour des raisons électorales stratégiques. »
Le Drian en éclaireur
Depuis, des sources bien informées ont confié à Crésus que de nombreux intermédiaires ont transmis des messages de la part du Président français à l’adresse de son homologue algérien en faveur d’une réconciliation. C’est donc un mois après la conférence de Paris sur la Libye que le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian est venu à Alger pour une visite affirmant la volonté de Paris de faire son mea culpa. Comme pour exprimer un soulagement à la sortie de l’audience que lui a accordée le Président Tebboune, Le Drian a déclaré «Ce déplacement (en Algérie) a pour double objectif de renouer une relation de confiance entre nos deux pays, marquée par le respect de la souveraineté de chacun, mais aussi de regarder vers l’avenir pour travailler à la relance et à l’approfondissement de notre partenariat qui est indispensable.» Pressé manifestement d’annoncer la reprise de relations diplomatiques «normales» entre les deux pays, le MAE français a précisé que «les deux parties ont convenu de reprendre certains axes de la coopération bilatérale. » et que cette coopération se traduirait « par la reprise d’un dialogue opérationnel entre partenaires sur les questions humaines et migratoires, et aussi par la reprise d’un dialogue opérationnel sur la lutte contre le terrorisme et par nos efforts communs pour assurer la sécurité de nos deux pays.» Il fallait donc que l’ambassadeur d’Algérie reprenne sa mission à Paris afin de revenir aux discussions et traiter les nombreux dossiers en suspens. A condition que les dirigeants français sachent éviter de mêler les relations franco algériennes au débat électoral de la Présidentielle prévue en avril.
Nordine Mzala