Par Amine Ghouta
Lors de cette célébration, le chef de l’Etat a distingué de nombreux hauts gradés de l’armée en activité ou à la retraite. Mais certains noms retiennent l’attention. Certes absents de la cérémonie pour «raison de santé » mais le fait d’avoir été mis sur la liste des personnes à honorer par le président Tebboune, n’a qu’une seule signification : ces hauts gradés de l’ANP, blanchis par la justice dans une première phase, viennent d’être officiellement réhabilités. Il s’agit notamment de l’ex patron du département de renseignement et de la sécurité (DRS) Mohamed Mediene dit Toufik et de l’ancien ministre de la Défense nationale Khaled Nezzar ainsi que du général major à la retraite Hocine Benhadid. Si pour Benhadid, cette distinction est la deuxième du genre, pour Nezzar et Toufik, c’est une première. Accusés d’avoir fomenter un complot contre l’Armée, l’Etat et le Hirak, les deux hommes avaient été jugé et condamné. Mohamed Mediène a même passé plus de 20 mois en prison, pour ces faits que l’on peut qualifier de haute trahison puisqu’il avait été accusé d’avoir porté « atteinte à l’autorité de l’Armée» et «comploter contre l’autorité de l’Etat » avec des agents secrets étrangers ! Khaled Nezzar, avait été, lui aussi condamné par contumace dans le procès du Complot où étaient poursuivis l’ex général Toufik et son successeur Bachir Tartag, le conseiller et frère du défunt président Bouteflika et la secrétaire générale du Parti des Travailleurs, Louisa Hanoune. Il avait pris la fuite vers l’Espagne avec son fils Lotfi, lui aussi cité dans cette affaire ainsi que le patron de la société des pharmaciens. Les trois hommes avaient été condamnés par contumace, à une peine de 20 ans de réclusion dans le procès du «Complot». Hocine Benhadid, lui, avait connu des déboires avec la justice, bien avant le Hirak populaire de 2019. Suites à ses sorties médiatiques, il avait été incarcéré par deux fois pour «atteinte au moral des troupes». Il a été réhabilité par l’institution qu’il a servi durant près de 40 ans, un 5 juillet 2020. Un hommage lui avait alors été rendu par le chef de l’état-major de l’Anp, le général de corps d’armée Saïd Chengriha, lors de la cérémonie du 58e anniversaire de l’indépendance. Ces trois hommes ont un point commun : à l’origine de leurs déboires avec la justice, la colère de feu Gaïd Salah contre leurs agissements. L’ex chef d’Etat-major avait estimé que ces ex gradés de l’ANP portaient atteinte à la stabilité du pays dans une conjoncture politique très délicate et compliquée après la démission du défunt président Abdelaziz Bouteflika. Pour y mettre un terme, il les avait alors avertit avant de les différer devant la justice. Terrassé par une crise cardiaque, le 23 décembre 2019, une dizaine de jours après l’élection du président Tebboune Ahmed Gaïd Salah cède sa place à Saïd Chengriha. Après sa disparition, Khaled Nezzar est rentré au pays et a bénéficier de l’extinction des poursuites à son encontre. Le général Hocine Benhadid a été libéré en janvier 2020 avant d’être envoyé en France pour des soins. Le général Mohamed Mediène est admis à l’hôpital Aïn Naâdja avant d’être transféré vers une clinique de rééducation sur les hauteurs d’Alger qui dépend de l’institution militaire. Son procès est à nouveau programmé et il se voit acquitter avec les autres accusés par le tribunal militaire de Blida. A bien voir donc, le président Tebboune et son chef d’état-major semblent avoir décidé de solder certaines affaires de justice dans lesquelles la main de Gaïd a été lourde. Ils semblent surtout décidés à montrer la voie pour la mise en œuvre effective de l’initiative du rassemblement à laquelle appelle le chef de l’Etat. Resserrer les rangs et renforcer l’union de l’ANP à travers l’expression d’une reconnaissance à tous ceux qui ont participé, au cours de leur carrière, à la sauvegarde de l’unité et de la souveraineté nationales, vise à donner l’exemple pour que l’Algérie, état et peuple, réussisse sa mutation. En réhabilitant ses anciens cadres, l’ANP applique bien la démarche du président de la République qui a dit que sa main est tendue à tous ceux « qui sont restés sur le rivage, sur la berge ou sur le bord de la route, ou qui se sentent marginalisés » et ces derniers doivent savoir «que la nouvelle Algérie leur tend les bras pour ouvrir une nouvelle page.»
Amine Ghouta