Le Conseil des ministres s’est réuni hier, comme à son accoutumée, sous la présidence de Abdelmadjid Tebboune. L’annonce de la réunion faite par l’Agence officielle, a précisé qu’un projet de loi relatif à la prévention et à la lutte contre la traite des personnes, sera examiné. Cela veut dire que l’Algérie s’apprête à décréter une loi relative à la prévention et à la lutte contre la traite des personnes. Pourquoi une telle loi sur la table du Conseil des ministres ? Le gouvernement fait-il dans la prospective ? S’agit-il uniquement d’une initiative à titre préventif puisqu’il est question d’un phénomène complètement méconnu et étranger à notre société ?
Du moins, aucune déclaration officielle, ni les rapports de presse n’ont jamais fait état de cas de traite des personnes dans le pays. Il s’agirait, peut-être donc pour l’Algérie juste de mettre en conformité sa législation avec les instruments internationaux ratifiés, notamment le protocole additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, dit le Protocole de Palerme, ratifié en 2003, exhortant les Etats membres, y compris ceux non touchés par ce phénomène, à se doter d’un dispositif légal et institutionnel en la matière. Et à ce propos, il y a lieu de rappeler qu’effectivement, l’Algérie a bel et bien créé, en 2016, un Comité national de prévention et de lutte contre la traite des personnes. Ledit Comité a été chargé de mettre en place une politique nationale et un plan d’actions dans le domaine de la prévention, de la lutte contre la traite des personnes et la protection des victimes. Il a d’ailleurs mené plusieurs activités dont une série de quatre formations au profit des juges, procureurs, gendarmes et policiers de différentes wilayas du pays. Il a aussi organisé des ateliers à l’intention des inspecteurs du travail et des experts de la Gendarmerie nationale, de la Police (DGSN) ou encore des représentants du ministère de la Justice et celui de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition de la femme. Le président de ce Comité, Merabet Abdelghani, a révélé, en mai dernier, à l’occasion du lancement des travaux d’une session de formation, que la traite des personnes «est un phénomène étranger à la société algérienne et relativement récent sous sa nouvelle signification. Toutefois, l’Algérie, qui n’est pas à l’abri de ce fait, a adopté toutes les conventions et les chartes internationales pertinentes, y compris la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale et le protocole d’interdiction et de lutte contre la traite des personnes, notamment les femmes et les enfants». M. Merabet dit qu’il s’agit d’un phénomène «relativement récent» dans la société, ce qui implique que les services de sécurité ont bien eu à démanteler des réseaux de traite de personnes dans le pays. En faisant des recherches, il apparaît clairement que le phénomène de traite des personnes existe en Algérie, mais ne concerne pas la société algérienne. C’est le rapport du département d’Etat américain de 2021 qui a soulevé ce sujet affirmant, à cette époque, que «l’Algérie est un pays de transit pour des hommes et des femmes qui font l’objet de traite de l’Afrique subsaharienne vers l’Europe pour des fins d’exploitation sexuelle commerciale et de travail forcé. Ces hommes et femmes entrent en Algérie de façon volontaire mais illégale, souvent avec l’aide de trafiquants. Certains d’entre eux deviennent des victimes de traite, les hommes sont forcés à devenir une main-d’œuvre non qualifiée et les femmes à se prostituer pour payer les dettes aux trafiquants.» Le rapport d’Etat américain avait alors recommandé à l’Algérie de veiller pleinement au respect des normes internationales pour l’élimination de la traite. Les efforts déployés par le pays dans ce sens ont finalement été reconnus, l’année suivante où le département d’Etat n’a pas manqué de classer l’Algérie dans la catégorie «Tière 2». Ce niveau de classement signifie qu’au regard de Washington, l’Algérie satisfait totalement à ses engagements internationaux en la matière. Cela revient à dire que les Etats-Unis considèrent l’Algérie comme un pays très en avance dans la lutte contre la traite des personnes. Après cette classification, l’Algérie qui fait sienne, le combat que mène la communauté internationale contre ce fléau, a décidé de poursuivre les efforts avec l’adoption d’un plan d’action 2022-2024 qui prévoit une série d’activités en matière de prévention, de poursuite, de protection des victimes et de développement de partenariats nationaux et internationaux. En plus de ce plan, le projet de loi sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes a été examiné hier. C’est dire l’exemplarité de l’engagement algérien dans ce contexte.
A. Gh.